Jérôme Cohen est fondateur d’ENGAGE et cofondateur du Grand Défi. Quelques réponses sur les ambitions et les fondamentaux du Grand Défi.

Vous avez fait le pari de l’intelligence collective, pourquoi ?

Il est proprement illusoire de penser que nous résoudrons les défis environnementaux et sociaux en pensant en silo. Les enjeux sont intimement interreliés, les réponses résident dans les interstices et les acteurs capables de contribuer à leur résolution viennent de tous les horizons. Il est donc nécessaire de constituer des écosystèmes divers et de faire travailler ensemble des compétences, des expériences, des sensibilités différentes qui se complètent pour trouver des réponses à la hauteur des enjeux. C’est ce que nous avons expérimenté en constituant en amont un écosystème extrêmement riche de plus de cent partenaires. C’est aussi ce qui a soutenu la démarche de délibération des délégués, enrichie des apports d’experts, de scientifiques, de chefs d’entreprises, d’acteurs de la transition. Le processus est incroyablement puissant, incarné par le chemin d’apprentissage et de mise en action individuel et collectif que toutes et tous ont emprunté mais aussi au regard des propositions dont, je l’espère, vous validerez la pertinence.

“Ce nouveau modèle implique d’interroger l’ordre des priorités entre l’économique, l’environnemental et le social”

 

Que signifie ce nouveau modèle de prospérité économique, humaniste et régénérative ?

Nous avons d’abord confirmé, lors de la consultation, l’attente profonde de transformation des acteurs de l’économie, qu’ils soient salariés, dirigeants ou actionnaires. Nous avons perçu aussi leur désarroi quant au nouveau modèle à inventer et à la trajectoire pour y parvenir. C’est précisément sur cette redéfinition de la mission des entreprises et de leur trajectoire de transformation que nous avons travaillé. Ce nouveau modèle implique d’interroger l’ordre des priorités entre l’économique, l’environnemental et le social ; il propose de repenser la place des femmes et des hommes et la gouvernance des organisations ; il impose aussi de redéfinir l’activité des entreprises au regard des limites planétaires et de la nécessité de régénérer les écosystèmes.

Pour concevoir ce nouveau modèle et le mettre en place, nous avons besoin d’une prise de conscience mais aussi de connaissances profondes, de nouvelles compétences, d’outils, de références et de normes partagées et c’est à cela que contribuent les cent propositions.

Que peut apporter le Grand Défi aujourd’hui ?

Le Grand Défi n’est pas un énième livre blanc consacré à la transition écologique et à sa nécessité. Il est tout au contraire un outil mis à la disposition des décideurs politiques, économiques et académiques pour accélérer opérationnellement et dès aujourd’hui la transformation de l’économie et des entreprises. Notre ambition consiste en ce que ces différentes sphères se saisissent des propositions dont les trajectoires d’application et processus de mise en œuvre sont détaillés. La troisième phase qui s’ouvre, celle de la diffusion, est donc décisive car c’est précisément dans cette étape d’appropriation que se mesureront notre impact et les transformations que nous saurons engendrer. Un seul mot d’ordre, que chacun s’empare des propositions pour les diffuser et travailler, dans sa propre sphère de responsabilité, à leur mise en œuvre.