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Sandrine Bissoulet est directrice général adjointe d’ENGAGE, passionnée de biodiversité, de truffes et de jardinage. Elle revient sur son rapport singulier au vivant et sur les sources et les intentions de l’exposition Nature On/ Off.

Sandrine, pourquoi cette exposition ?

Cette exposition est née d’un défi : reconnecter au vivant. Car si l’effondrement de la biodiversité constitue une menace sans précédent pour l’humanité, cette réalité reste abstraite et souvent lointaine. Malheureusement les conférences et rapports sur le sujet ne font pas suffisamment bouger les choses…
Nous avons imaginé une exposition à impact pour frapper les esprits et provoquer un déclic. L’image, c’est un langage universel, qui permet de parler à tout le monde, quels que soient l’origine, l’âge ou la culture. L’ambition est d’engager un large public : des jeunes, des vieux, des salariés, des patrons, des parents, des enfants….
Ouverte à tous, Nature On/ Off propose une expérience sensible et artistique. Nous sommes convaincus qu’il faut replacer le sujet vivant dans la culture, au-delà du cercle de la science ou de l’information…et dans une culture populaire. C’est pourquoi les tableaux sont tous des chefs-d’œuvres connus du plus grand nombre !

Elle raconte quoi finalement ?

Sa force est de montrer avant de raconter. Ces tableaux révèlent les impacts que nous avons sur le vivant et à quel point nous en sommes dépendants. Ils nous projettent dans ce monde privé de biodiversité qui nous attend si nous ne faisons rien.
Nature On/ Off permet d’illustrer les grandes causes de disparitions de la biodiversité tout d’abord. Ce travail est primordial car peu de gens les connaissent et savent que la première est le changement d’affectation des terres et des mers par exemple.
Elle matérialise comment cela se passe concrètement :  on construit un parking et Le Déjeuner sur l’herbe devient Le Déjeuner sur béton; on passe à la monoculture de maïs et Les Maïs remplacent Les Coquelicots de Manet.

Ensuite, l’exposition révèle les dépendances que nous avons vis-à-vis d’elle. Un concept complètement nouveau pour beaucoup ! Si on comprend facilement l’importance des pollinisateurs ou des plantes qui nous nourrissent, on sait moins que la biodiversité régule le climat. Et on a rarement conscience qu’elle nous inspire au quotidien, pour innover… ou dans la création. Comment aurait peint Elisabeth Vigée le Brun, si inspirée par la nature, en 2024… probablement de manière moins champêtre !

La reconnexion au vivant est donc pour toi le problème n°1 ? Est-ce le seul ?

Aujourd’hui 80% des populations vivent en milieu urbain. En France, on vit à 16 km en moyenne d’une zone naturelle. Alors oui, on est déconnecté : dans la ville, peu d’espace végétalisé, peu de biodiversité, pas d’espace sauvage, on ne voit plus la nuit, il n’y a plus d’animaux ou si peu… C’est un éloignement du vivant qui s’assortit d’une perte d’expérience sensible.

Cette distance est aggravée par l’excès de vitesse permanent ! On n’a plus le temps, on “switche”, on “zappe”, on “circule”. Alors que pour le vivant, la nature, il faut s’avoir s’arrêter, patienter. C’est nécessaire pour écouter, regarder, sentir, toucher, goûter.

Enfin, c’est un sujet grave qu’il faut pouvoir aborder sans tétaniser devant l’ampleur de la tâche ! On doit pouvoir être sérieux sans se prendre au sérieux. Le décalage et la créativité de Nature On/ Off étonnent, intriguent, font réagir, font parler : nous cherchons  une prise de conscience sans pathos. L’important c’est que l’effet produit soit une mise en action, en mouvement.

Ton œuvre préférée ?

Mon cœur balance entre Déjeuner sur béton et Chardonneret 2024.

Déjeuner sur Béton par la puissance de l’image qui matérialise la première cause de disparition de la biodiversité : le changement d’affectation des terres et des mers. En France, la consommation d’espace naturels, agricoles et forestiers atteint près de 25 000 hectares par an (soit approximativement la surface du Val-de-Marne ou de la Seine-Saint-Denis).

Le chardonneret car il me touche au cœur. J’ai déjà pu les observer se délecter de graines en virevoltant autour de pissenlits. Cette élégance et ce moment de grâce, j’ai bien peur que mes enfants ne le connaissent jamais.

Et tes futurs désirables en matière de biodiversité ?

Au niveau personnel, que les Causses du Périgord de mon enfance continuent à vivre dans leur richesse : prairies sèches et chênes pédonculés rabougris écrasés par le soleil d’été, vibrant du vacarme réjouissant des grillons et du vol délicat des papillons azurés…

Au niveau de la société, que nous avancions avec la tête, le coeur, la main et dans le collectif pour vivre heureux dans un monde vivant :
La tête : rester curieux, ouverts pour connaître sa magie, sa richesse;
Le coeur : regarder, écouter, caresser, toucher, sentir les sols, les bois, les prés;
La main  : planter, semer, cueillir, cuisiner au rythme des saisons;
Le collectif : se promener, échanger, cultiver entre amis, en famille, dans sa ville ou, tout simplement, ensemble.

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Marie-Sarah Adenis, sera intervenante du festival Life! et y présentera son exposition Gloire aux microbes.
Artiste-designer, diplômée en création industrielle (ENSCI) et en biologie (ENS Ulm), elle est co-fondatrice et directrice artistique de l’entreprise PILI et enseigne dans des écoles d’art et de design.

Quelle est votre relation à la biodiversité et au vivant ?

Ma première relation est une appartenance évidente puisque je suis moi-même partie prenante de cette biodiversité. Mes études de biologie m’ont permis d’établir une connexion plus fine en prenant conscience de la richesse infinie de son histoire évolutive, des mécanismes qui sont à l’oeuvre en nous et partout autour de nous. C’est un premier prisme théorique mais vertigineux et passionnant.
J’ai aussi construis au fil du temps une relation plus directe et plus surréaliste avec les autres vivants, notamment avec les êtres microscopiques qui invitent à un rapport presque magique quand on comprend que le monde est fait de ce tissu invisible vivant qui rend la vie possible par le biais de ces micro-organsimes. J’ai toujours un petit microscope de poche sur moi qui me permet de voir ce qui m’entoure et qui m’échappe. Cela crée une attention au monde radicalement différente. De la même manière que je “vois” l’invisible, je “sens” les vivants à travers l’emprunte qu’ils laissent derrière eux. Je respire leur activité métabolique à chaque bouffée d’oxygène, je partage mes repas avec eux au moment de la digestion, et j’établis cette connexion intime de plein de manières qui rendent ma perception plus fine et plus riche. C’est comme ça que j’habite le monde et que je lui donne du sens.

Pouvez-vous partager une anecdote qui illustre ce rapport ‘intime’ ?

J’en ai beaucoup mais la plus récente est la rencontre que j’ai faite et documentée avec une mue de crabe sur l’île de Lanzarote. Je l’ai emmenée partout avec moi, dans les randonnées, sur les volcans où je retournais avec elle aux premiers matins du monde, mais aussi dans les bars et les restaurants où je la posais sur la table face à moi, ce qui ne manquait pas de créer du trouble, des rires, des regards intrigués, et je pense que ce trouble est une bonne chose. C’est le point de départ de tout renversement de notre rapport au monde. Il faut inventer d’autres manières de vivre cette immense fresque burlesque, fragile et foisonnante qu’est la vie.

Pour vous, qu’est-ce que la biodiversité représente ?

La biodiversité est un vertige. Elle représente le miracle de la vie qui se perpétue depuis 3,8 milliards d’années. C’est aussi ma famille. Chaque être est un cousin ou une cousine, plus ou moins éloignés. Ce sont autant de formes spectaculaires et divergentes que la vie a prises pour s’incarner et peupler le monde. Elles viennent toute à l’origine d’ancêtres unicellulaires qui ont été les premiers à expérimenter la vie et qui ont établi la grammaire et les règles auxquelles nous nous soumettons encore aujourd’hui, avec quelques fautes de frappes qui sont parfois retenues et qui enrichissent d’autant le vocabulaire de la vie qui se prononce avec des ailes, des griffes, des neurones, des branchies, des capteurs sensoriels extrêmements variés qui donnent à chaque être une expérience du monde singulière et une umwelt particulière.
Et puisqu’il est question de biodiversité ici, il faut qu’on prenne conscience que les microbes forment la clé de voûte des écosystèmes. Aucune vie ne serait possible sans eux non seulement parce que ce sont eux qui nous ont donné la vie à l’origine, mais aussi parce qu’ils sont aujourd’hui les gardiens du temple, ceux qui perpétue et régule la vie, ceux qui peuvent la faire basculer dans un sens ou dans un autre.

Vous présenterez notamment l’exposition ‘Gloire aux Microbes’ lors du festival. Quelle est l’ambition de cette exposition ?

Gloire aux microbes est un cri d’amour qui visait à contrecarrer l’animosité et la terreur que les microbes ont toujours inspirés aux humains, plus encore avec la dernière pandémie. Le projet renouvelle les mots et l’imagerie pour conter l’histoire vraie et fascinante des microbes. Le point de départ est un texte manifeste que j’ai écrit comme un “Appel microscopique du 18 juin” (2020). J’ai ensuite réuni douze artistes qui se sont emparés des faits scientifiques qui sont détaillés dans le texte, et qui les ont sublimé dans des dessins qui proposent de nouveaux imaginaires, radicalement différents de ceux qui se sont cristallisés en nous.
Enfin, les oeuvres ont été sérigraphiées avec une encre produite par les bactéries elles-mêmes, ce qui donne une raison de plus de s’émerveiller de leurs pouvoirs innombrables. C’est un projet exigeant qui ne se contente pas de faire de la vulgarisation mais qui cherche à travers le texte et l’image à proposer un contrepoint puissant à nos imaginaires collectifs. C’est surtout une occasion de s’émerveiller avec la possibilité de parler de vivant et de biodiversité dans une perspective enthousiasmante, qui redonne le sourire alors que tout ce qu’on peut constater par ailleurs est clairement décourageant. Enfin un sujet qui donne de l’espoir !

Enfin, quels sont vos futurs désirables en matière de biodiversité ?

J’aimerais qu’on dépasse nos peurs et qu’on se mette à voir dans l’invisible, à travers l’espace et à travers le temps, pour reconnaître nos liens et nos interdépendances avec les autres habitants de la planète, qu’on puisse enfin voir en eux la puissance de nos alliances passées, présentes et à venir. La preuve avec le projet Pili que j’ai co-fondé (qui porte d’ailleurs le projet Gloire aux microbes) et qui fait alliance avec les bactéries pour produire des colorants et pigments écologiques. Une solution née de la collaboration entre les humains et les bactéries (même s’il faut bien dire que les humains portent déjà en eux bien plus de bactéries que de cellules humaines !).

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Arup Ghosh a créé la Tomorrow’s Foundation il y a près de 30 ans à Calcutta. Partenaire de la création d’ENGAGE India, il s’emploie aujourd’hui à créer des liens entre nos deux régions. 

You are the co-founder of the Tomorrow’s Foundation, partner of ENGAGE in India, could you tell us more about it?

I, along with my brother Swarup, created the Tomorrow’s Foundation about 29 years ago with the blessings of Mother Teresa.
The main objective being to cater to the needs of underprivileged children and youth in the field of education Livelihoods through a life cycle approach. The main pillars being education, child protection, disability and skills Livelihoods. Through this long journey we have impacted more than 35,000 children and youth.

What are the more pressing issues for India today?

As per the world Economic Forum Report by 2030, India is poised to become the third largest economy, which will represent both opportunities and challenges.
In coming decades, consumption growth and the Fourth Industrial Revolution will create tremendous opportunities in the emerging Indian market.
3 Pressing challenges are certainly ahead :
1. Skills development and employment for the future work force. As 10-12 million working age people will emerge in India over the next decade.
2. Socio economic inclusion of rural India.
3. Health and Sustainable future.
New health concerns, urban centres grappling with high rates of congestion air, water and waste pollution are undermining the well being of Indian citizens.
To sustain future growth, business and policy makers must address these challenges together to find solutions.
The country will urgently need young dynamic conscious leaders.

What do you think ENGAGE can favorise in India ?

Engage university founded in 2015 aims at empowering future leaders by developing their knowledge of the 21st century challenges and their mastering of the necessary soft skills.
Both private and public sectors have a major role in this upcoming evolution and need therefore to hire next generation conscious leaders. India really needs that.
Plus top of it India must quickly learn from the developed nations the various knowledge and skills to address their challenges.

Do you wish to create more links between India and Europe?

In order to have an inclusive world, I think the time has really come to share and build bridges between countries and continents.
Developed nations like Europe can share the best practices while emerging countries can share frugal innovations, etc.
India being one of the biggest democratic country in the world also has a great treasure of wisdom and knowledge on spirituality which must be shared.
The différent cliches which India still holds today must be broken so that she can encompass the other developed nations for mutual benefits at all levels.

You participated to the programmation of the Indian Festival. Tell me more…

Modern India is a great mix of old traditions plus new cutting edge technology, innovation, etc.
This festival will try to show the various facets of classical musics which varies from one state to another. Renowned artists will try to showcase this mosaic of different forms of art and culture.
It will try to create bridges to inspire more people in Europe and nourish their curiosity.
Live it and feel it …..

One world to describe our desirable futures ?

Samata sarvabhutesu etad muktasya laksanam 😉 …which means…
Equality in all beings, this is the sign of Freedom.

Namaste 🙏

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