La conjoncture qui se durcit, les perspectives qui s’assombrissent, la fluctuation des réglementations et l’inflation fiscale ont déjà sonné le glas d’une série d’actions, initiatives, programmes, soutiens et investissements en faveur de la biodiversité, du climat et de l’environnement en général. Beaucoup de structures associatives, de conseil, de formation, de recherche ou d’entreprises innovantes se voient déjà nettement fragilisées et tirent le signal d’alarme. On se dirige tout droit vers un tsunami de la démobilisation, du découragement et un crash de l’économie de la transition.

La conjoncture ne doit pas mettre l’avenir en pause.

Chers partenaires, tant publics que privés, qui œuvrez déjà à rebâtir ce monde de demain, restez sur le pont et au front à ce moment crucial, lorsque tout se joue. Maintenez vos programmes de recherche, vos actions de sensibilisation et de formation, les événements qui font grandir les idées et les solutions d’avenir, les programmes expérimentaux, les réflexions stratégiques, les investissements dans les solutions d’avenir. Vous en avez été pour certains les pionniers et initiateurs, n’affalez pas les voiles face au coup de vent conjoncturel. Pour ne pas s’arrêter en pleine course, mais s’adapter aux courants et contraintes, réorienter les priorités, se focaliser sur les actions concrètes de terrain, ne pas subir mais transformer ces enjeux en nouveaux atouts. La conjoncture ne doit pas mettre l’avenir en pause.

La Nature, elle, n’attend pas. La planète et l’Humanité n’ont pas les moyens de remettre ces actions et investissements à plus tard, ce qui n’aurait qu’une seule conséquence, celle d’accélérer la chute du cours de l’action Vivre sur Terre et le coût des décisions futures. Les effets du dérèglement climatique et de l’extinction de la biodiversité ne suivent pas un lent processus linéaire, c’est par étapes violentes, subites et douloureuses que l’histoire va s’écrire. Les contraintes de pouvoir d’achat, les flux migratoires, la santé humaine, le coût des soins, les rendements agricoles, la qualité de vie, les catastrophes dites naturelles … tout ne fera que s’aggraver encore davantage si on lâche maintenant. Personne ne peut profiter de sa vie ou bâtir des projets sur une planète en surchauffe, appauvrie et insalubre.

L’avenir a besoin de vous, ne le lâchez pas au cœur de la bataille, il vous le rendra au centuple.

Investir le long terme et le bien commun, c’est rentable. Nous vivons désormais en communauté de destins, liés, et cela renverse les paradigmes et schémas de pensée qui ont bâti notre croissance économique depuis le 18ème siècle : nos intérêts économiques individuels dépendent de notre capacité à servir les intérêts collectifs, en investissant dans le bien commun pour le maintenir en bonne santé économique, sociale et écologique. Le manque de vision et de continuité n’a déjà que trop nui à la crédibilité politique, à la pérennité économique, et à la capacité à proposer le projet et récit collectif tant attendu et tant repoussé.

Demain a déjà démarré. Les solutions sont là, les alternatives existent, le travail de prise de conscience a été largement entamé, lâcher maintenant c’est comme refuser de prendre ses bénéfices, c’est accepter de perdre des années d’investissement et de travail. L’écosystème socio-économique de la transition reste sur le pont et mobilisé. Le relâchement conjoncturel va en décimer les troupes, et contrairement au tardigrade, il ne redémarrera pas à la première goutte d’eau budgétaire. Ralentir maintenant, c’est aussi décevoir votre propre mobilisation interne, nuire à votre crédibilité, à votre attractivité auprès des nouvelles générations. C’est aussi laisser le champ libre d’un côté aux sceptiques, et de l’autre au contraire aux acteurs qui maintiendront leurs engagements et tireront profit de l’avenir.

L’avenir a besoin de vous, ne le lâchez pas au cœur de la bataille, il vous le rendra au centuple.

Article paru dans La Tribune

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(*) Co-signataires :

  • Fanny Agostini, journaliste, co-fondatrice de Landestini
  • Arthur Auboeuf, co-Fondateur de Team for the Planet
  • Lucie Basch, co-Fondatrice de Too Good To Go ; Présidente de la Climate House
  • Sandrine Bélier, Directrice d’Humanité et Biodiversité
  • Maxime Blondeau, Fondateur de Cosmorama
  • Gilles Bœuf, Biologiste ; ancien Président du Muséum national d’Histoire naturelle ; Professeur à l’université Pierre-et-Marie-Curie et Sorbonne Université
  • Gildas Bonnel, Président de la Fondation pour la Nature et l’Homme
  • Fabrice Bonnifet, Président du Collège des Directeurs du Développement Durable (C3D)
  • Allain Bougrain Dubourg, Président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO)
  • Tarik Chekchak, Directeur du pôle stratégies inspirées du vivant de l’Institut des Futurs souhaitables
  • Jérôme Cohen, Président-fondateur d’Engage
  • Franck Courchamp, Directeur de recherche CNRS ; Médaille d’argent CNRS ; Grand Prix de la Société Française d’Ecologie & Evolution ; Chaire Biodiversité au Collège de France
  • Emmanuel Delannoy, co-créateur de la Fresque de l’économie régénératrice
  • Eric Duverger, Fondateur de la Convention des Entreprises pour le Climat (CEC)
  • Marion Enzer, Directrice du Développement de Fermes d’Avenir ; Coordinatrice France du Climate Reality Project
  • Françoise Gaill, Vice présidente de la plateforme Océan & Climat
  • François Gemenne, Président du conseil scientifique de la Fondation pour la Nature et l’Homme
  • Philippe Grandcolas, Directeur de recherche CNRS ; Professeur du Muséum national d’Histoire naturelle
  • Roland Jourdain, Navigateur ; co-fondateur du Fonds de dotation Explore
  • Galitt Kenan, Directrice du Jane Goodall Institute France
  • Henri Landes, co-fondateur de Landestini
  • Alizée Lozac’hmeur, co-fondatrice et porte-parole de makesense
  • Henry François Martin, co-directeur général de la Climate House
  • Claudio Muskus, Directeur général de Fermes d’avenir
  • Maika Nuti, co-directrice générale de la Climate House
  • Alexandra Palt, Présidente du WWF France
  • Magali Payen, Fondatrice d’OnEstPrêt et d’Imagine 2050
  • Kalina Raskin, Directrice générale du Ceebios
  • Alain Renaudin, Président-fondateur de Biomim’expo et de NewCorp Conseil
  • Patricia Ricard, Présidente de l’Institut Océanographique Paul Ricard
  • Cédric Ringenbach, Fondateur de la Fresque du Climat
  • David Robert, Directeur général de J’accueille by Singa
  • Maxime de Rostolan, Fondateur de Sailcoop ; Fondateur de Planteurs d’avenir
  • Jacques Rougerie, Architecte ; Membre de l’Institut
  • Sabine Roux de Bézieux, Présidente de la Fondation de la mer
  • Brieuc Saffré, co-fondateur et CEO de Circulab
  • Marc-André Selosse, Professeur du Muséum national d’Histoire naturelle ; Président de la Fédération Biogée
  • Isabelle Susini, Directrice du 1% pour la Planète
  • Romain Troublé, Directeur de la Fondation Tara Océan ; Président de la plateforme Océan & Climat
  • Christian Vannier, Créateur et directeur du Forum International de la Météo et du Climat
  • Jean-Luc Verreaux, Directeur général de l’Institut des Futurs souhaitables

Et si…Et si finalement l’arrivée de Trump à la tête des Etats-Unis était une chance, voire une dernière opportunité, à ne surtout pas laisser passer.

Une chance pour l’Europe, une chance, pour notre démocratie, notre économie, l’environnement ou notre système éducatif… Et si nous nous apercevions que Trump est le symptôme d’un monde en fin de vie et qu’il s’agit aujourd’hui de faire des choix structurants, sous peine de sombrer définitivement. 

Il s’agit de changer drastiquement nos logiciels

Un dernier rappel à l’ordre alors que notre modèle insoutenable tente de résister dans un dernier cabrage mortifère. Il s’agit désormais de changer de route, définitivement, sans regret aucun. Il s’agit de changer drastiquement nos logiciels. 

Bien sûr, Antonio Gramsci avait raison. C’est dans ces périodes de clair-obscur entre deux mondes qu’apparaissent les monstres et nous sommes bien entre deux ères. Et Trump est manifestement un monstre. De vulgarité, d’idiotie, d’incompétence, de masculinisme. La litanie serait longue. Chacun choisira ses qualificatifs. Mais il peut aussi jouer le rôle improbable, involontaire, inattendu et pour tout dire efficace de lanceur d’alerte lorsque tant d’autres ont échoué.

Avec lui, la vulgarité fait office de culture de gouvernement, la vanité de mission et l’improvisation de stratégie. A nous, ici, en Europe, de réinventer justement notre façon de faire Europe, de gouverner, de nous donner collectivement une mission à la hauteur des enjeux, une stratégie claire et des moyens pour y parvenir.

Nous avons l’occasion unique de nous unir, de faire alliance à tous les niveaux, pour inventer un autre modèle qui nous corresponde, qui assimile nos valeurs et nous projette vers un monde habitable, juste et désirable.

Cela veut dire avoir le courage de repenser nos modèles démocratiques pour les rendre fondamentalement et sincèrement participatifs. Cela veut dire abandonner la vieille doxa économique pour réinventer des modèles compatibles avec le vivant, humain et non humain. Cela veut dire aussi assumer des choix de société avec clarté et détermination pour décider collectivement nos investissements et faire émerger, de façon volontariste, une société juste, régénératrice et émancipatrice. 

Et si toutes les outrances de Trump et de son administration nous poussaient à redéfinir une éthique de l’action, politique et économique

Trump trahit l’Europe et le multilatéralisme, construisons enfin les Etats-Unis d’Europe, des peuples, sur un autre modèle de croissance qui s’émancipe de la pensée unique et de la surconsommation morbide. Trump bafoue la veille démocratie américaine, réinventons la nôtre vers plus de participation et de proximité. Trump se retire des Accords de Paris, faisons bloc et renforçons nos ambitions écologiques, en matière de climat et de biodiversité. Trump impose des droits de douane imbéciles et erratiques, sortons de notre naïveté ou de notre faiblesse et construisons une zone ouverte mais protégée, solidaire et juste, fondée sur des critères environnementaux et sociaux. Trump trahit la science et l’éducation, investissons massivement dans la recherche, le savoir et les futures générations, à l’heure où l’esprit critique constitue un outil de résistance massive de nos piliers fragilisés. 

Ces exemples, nous pourrions les multiplier, aborder les enjeux de santé, de technologie, d’IA…
Il ne s’agit pas d’égrainer des y’a qu’à faut qu’on désincarnés mais de dessiner une vision et de définir des objectifs impératifs que nous devons nous assigner pour faire advenir le monde dans lequel nous voulons vivre.

La marche est haute probablement, mais d’une contrainte immédiate et sidérante, faisons collectivement une opportunité de long terme. Faisons de l’Europe un phare, non pour nous opposer mais pour progressivement imposer sans frilosité notre modèle. 

Et si toutes les outrances de Trump et de son administration nous poussaient à redéfinir une éthique de l’action, politique et économique, un humanisme 2.0 qui fasse du vivant, humain et non humain, notre gouvernail ?

Jérôme Cohen
Fondateur ENGAGE

Jean-Louis Bertrand est CEO de Tardigrade AI, Vice-président du GIEC Pays de la Loire et professeur de Finance à l’ESSCA. Il a notamment été expert pour le Grand Défi. Dans cette interview, Jean-Louis nous parle de son nouveau projet Tardigrade AI qui a pour mission d’agir et de renforcer la résilience des entreprises et des collectivités face au changement climatique mais aussi pour préserver le bien-être des employés et des usagers.

Pouvez-vous vous présenter ?

J’accompagne les entreprises face aux risques climatiques depuis plus de 20 ans. J’ai participé au Grenelle de l’environnement en 2007, étudié l’impact du climat sur l’activité des entreprises pour piloter  leur quotidien, créé des produits financiers pour les protéger à court terme et les aider à faire face durablement. Mon engagement se prolonge avec le GIEC des Pays de la Loire dans un rôle de Vice-Président et porte-parole.

Pourquoi avoir créé Tardigrade AI ? 

Je souhaitais partager ce que j’ai appris dans une offre de services actionnables pour agir et renforcer la résilience des entreprises et des collectivités face au changement climatique et pour préserver le bien-être des employés et des usagers.

Le tardigrade est un micro-organisme connu pour son extrême résilience et sa capacité d’adaptation aux conditions les plus hostiles (froid, chaleur, vide spatial).

A son image, Tardigrade AI propose des solutions pour s’adapter aux défis climatiques, en transformant l’incertitude en opportunités d’actions concrètes pour un avenir plus résilient pour tous.

Comment ça marche ?

Notre méthodologie A.D.A.P.T. (Anticiper/Diagnostiquer/Adopter/Protéger /Transformer) est directement inspirée des besoins remplis sur les post-it pendant les rendez-vous du Grand Défi. Nous avons développé les outils de formation pour embarquer les équipes dans l’adaptation et la résilience. Nous proposons un diagnostic précis à la coordonnée GPS, disponible partout dans le monde et accessible financièrement au plus grand nombre. Enfin, nous avons mobilisé des partenaires pour le traduire en solutions concrètes. Chaque organisation peut ainsi comprendre son exposition face aux risques climatiques actuels et à venir, sélectionner et dimensionner les stratégies d’adaptation pour continuer à développer son activité.

A qui est destiné cet outil ?

ADAPT est disponible pour tout type d’entreprise ou collectivité,  quelle que soit sa taille.

Question 5 :  Une entreprise, à quoi lui sert votre analyse ?  Et comment peut-elle s’en servir ? 

Notre plateforme A.D.A.P.T. offre un cadre d’actions, quel que soit le niveau d’avancement de la réflexion des parties prenantes, pour s’engager dans la voie de l’Adaptation et de la Résilience Climatique.  

  • Anticiper : c’est prendre conscience de la réalité du dérèglement climatique et de la nécessité de tout mettre en œuvre pour assurer sa résilience,
  • Diagnostiquer : c’est disposer d’indicateurs de risque fiables pour bâtir une stratégie d’adaptation et de transformation,
  • Adopter : c’est partager la stratégie avec l’ensemble des collaborateurs et des partenaires,
  • Protéger : c’est s’engager dans la mise en œuvre,
  • Transformer :  c’est protéger les personnes et les biens face aux changements climatiques, et assurer la prospérité de l’entreprise.

Vous étiez expert pour le Grand Défi : cela a-t-il eu un impact sur Tardigrade AI ? 

C’est l’ADN de notre entreprise ! Nous nous sommes attachés à remplir chaque critère du cahier des charges idéal qui a émergé au travers des ateliers et des réunions Teams. Transparence, fiabilité, accessibilité, facile à utiliser… c’est ce qui nous a guidé. Nous avons construit notre solution à partir d’un besoin exprimé par des personnes engagées qui avaient à cœur d’agir, et de poursuivre le développement de leurs entreprises dans le respect de la planète et des gens, quand les autres solutions d’évaluation de risque climatique fournissent des scores à des gérants de portefeuilles… Tout est dit

Et vos futurs désirables ?

Nous n’avons qu’une planète et il n’y a pas de plan B ! ce que nous voulons préserver, c’est notre capacité à l’habiter et à y vivre. Œuvrons pour un avenir qui puisse concilier respect de la planète et développement économique sans oublier le bien être humain. L’ambition est énorme mais c’est la mission que nous nous sommes donnée en créant Tardigrade : aider à intégrer le changement climatique dès maintenant, lui donner un coût, un horizon sur lequel on peut mesurer les progrès, pour préserver l’outil de travail et le bien-être des collaborateurs, et pour inciter à se transformer durablement.

Une seule santé, plusieurs bénéfices
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Selon l’Organisation mondiale de la santé, chaque année, 13 millions de décès sont dus à des causes environnementales évitables, telles que la pollution atmosphérique, la dégradation des sols, la perte de biodiversité ou la mauvaise gestion de l’eau purifiée. En effet, jusqu’à 25% des maladies dans le monde sont causées par une exposition à un environnement dégradé dans un contexte qui pourrait être évité. Par conséquent, les bouleversements environnementaux, la dégradation de la nature et la disparition de la biodiversité sont une menace de 1er ordre pour la santé humaine.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que les facteurs environnementaux sont responsables de 23 % des décès et 25 % des pathologies chroniques dans le monde.

Ces chiffres donnent le vertige, tout comme les prévisions : entre 2030 et 2050, l’OMS s’attend à ce que le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité entraînent près de 250 000 décès supplémentaires par an, dus à la malnutrition, au paludisme, à des diarrhées, aux épisodes de forte chaleur… D’ici peu, la destruction des écosystèmes, la perte de biodiversité, le dérèglement climatique mais aussi la diminution de la qualité de l’air et de l’eau pourraient compter parmi les premières causes de morbidité dans le monde.

Santé et biodiversité, main dans la main

Aujourd’hui, les scientifiques inventent de nouveaux concepts pour faire le lien entre environnement et santé : une seule santé, santé planétaire, pleine santé … Cette nouvelle vision de la santé humaine se définit à trois niveaux :

  •  Au niveau individuel, en montrant la continuité entre la santé physiologique et psychologique. Cela permet de reconnaître notamment les bienfaits du contact avec la nature pour notre bien-être.
  • Au niveau sociétal, en reconnaissant la continuité entre la santé de l’individu et la santé du collectif. Nous dépendons tous des autres pour nous soigner, et plus largement pour notre bien-être. Par conséquent, la santé est avant tout coopérative.
  • Au niveau environnemental, en intégrant la continuité entre la santé des humains et la santé des non-humains. Notre santé dépend de la bonne santé des écosystèmes. Par conséquent, détruire la biodiversité, c’est menacer notre santé.

Comprendre et appréhender les liens entre les conséquences des activités humaines sur l’environnement et sur la santé des humains, des écosystèmes est un outil puissant de réflexion et d’amélioration de la santé, de l’équité et du bien-être de tous les humains et des écosystèmes.

Face à ce constat : la mise en action par les co-bénéfices

La lutte contre le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité représente une opportunité pour la santé et la pleine santé. En effet, les efforts d’atténuation du changement climatique et de restauration de la biodiversité aux niveaux individuel et collectif s’accompagnent souvent davantage substantiels pour la santé des individus et de la population en général. C’est ce qu’on appelle les co-bénéfices.

En d’autres termes, lutter contre le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité, c’est bénéfique pour la santé et protéger sa santé, c’est bénéfique pour le climat et la biodiversité.

La diminution de la qualité de l’air compte parmi les causes premières de morbidité dans le monde.

Au quotidien, quels changements ?

Avoir la capacité de s’alimenter correctement et adopter des modes de transports dits « actifs », c’est augmenter ses chances de vivre en bonne santé, de réduire le risque de maladies chroniques. Les effets en cascade peuvent suivre un schéma vertueux et l’urgence aujourd’hui est d’adopter des modes de vie plus soutenables.

  • Le choix d’une alimentation moins carnée n’est pas négligeable. Les produits issus des animaux – viande rouge en tête – sont ceux qui sont à l’origine des émissions de gaz à effets de serre les plus importantes (méthane et protoxyde d’azote, deux gaz à effet de serre beaucoup plus puissants que le CO2), mais aussi de la déforestation des terres pour des cultures d’élevages intensifs, l’utilisation de pesticides pour les fourrages, la disparition des haies et des habitats sauvages, la pollution des eaux … La consommation individuelle est bien souvent supérieure aux recommandations de l’OMS, entraînant des pathologies comme l’obésité, des cancers ou des maladies cardiovasculaires. Des travaux scientifiques ont montré qu’en diminuant de 30% sa consommation de viande, on réduisait de 40% les émissions de gaz à effet de serre liées à son alimentation, et de près de 20% le risque d’obésité ou de développer ou d’aggraver les maladies cardiovasculaires. Limiter sa consommation de viande à deux ou trois fois par semaine est déjà significatif pour le climat, la biodiversité et la santé.
  • L’adoption de modes de transport dits « actifs » constitue une autre type de co-bénéfices pour la santé et l’environnement. Adopter des transports décarbonés ou faiblement carbonés a un impact sur la qualité de l’air, la diminution de la fragmentation des corridors écologiques et de l’artificialisation des sols. La mobilité active (vélo, marche…), pour les personnes ayant le recours régulier à ces moyens de déplacement pour de petits trajets, participe à la prévention de diverses pathologies. Nous pouvons citer 5 maladies chroniques pour lesquelles le bénéfice de la pratique du vélo est scientifiquement avéré : les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2, le cancer du sein ou du colon et la démence.

Les co-bénéfices pour la santé et l’environnement : choix d’une alimentation moins carnée
et adoption de modes de transport dits « actifs ».

Une synergie pour un avenir meilleur

La question des co-bénéfices dépasse le cadre individuel. On est aujourd’hui en mesure de quantifier l’impact positif de l’adoption de comportements vertueux à l’échelle collective, cela concerne la prise en charge des dépenses de santé notamment. Il est estimé ainsi qu’un cas de diabète prévenu évite annuellement à la collectivité près de 36 000 euros de dépenses médicales. Par ailleurs, une étude a ainsi mis en évidence que la pratique hebdomadaire d’1h40 de vélo réduisait le risque de décès (toutes causes confondues) de 10 %.

Une équipe de chercheurs français a récemment cherché à évaluer les bénéfices pour la santé liés aux transports actifs dans un scénario de transition bas-carbone, ils ont pu mettre en évidence que les gains pour la santé de ce scénario pourraient être considérables, et ce dans un futur proche. Dès 2025, cette hausse des transports actifs se traduirait par environ 3 000 décès évités annuellement. Sur le plus long terme, à l’horizon 2050, cela représenterait près de 40 milliards d’euros de bénéfices cumulés.

Ainsi, tout l’intérêt de ces mesures, c’est qu’elles vont se traduire à court terme et être perceptibles rapidement pour la santé humaine et la biodiversité, tandis qu’il faudra des centaines d’années pour que les bénéfices pour le climat soient perceptibles.

Célestine Schmid
Chargée d’étude Biodiversité

Pour aller plus loin :

Pour en savoir plus :

– Suivre notre Atelier MISSION Biodiversité : https://lnkd.in/eJb2zJ35
– Suivre notre MOOC Biodiversité : https://lnkd.in/eTXq7iUE
– Participer à notre formation Action Biodiversité : https://lnkd.in/e93iX_WZ

Les micronectons sont de petits organismes vivants présents dans les océans et qui jouent un rôle crucial dans la pompe biologique, essentielle pour réguler le climat de la Terre en transférant le carbone et en absorbant le surplus de CO2 anthropique causé par les activités humaines. Malgré leur découverte à la fin du XIXème siècle, le rôle essentiel du micronecton dans la pompe biologique, moins étudié que le phytoplancton et le microplancton, reste relativement méconnu du fait des difficultés d’observation et de la disponibilité des données scientifiques. Nous avons mené l’enquête !

C’est quoi le micronecton exactement ?

Le micronecton est une espèce marine composée de petits organismes vivants mesurant entre 2 et 20 centimètres, tels que des poissons, mollusques, crustacés, céphalopodes et organismes gélatineux qui interagissent ensemble.

Dessins schématiques de différentes espèces de micronectons : poissons, crustacés, céphalopodes.

Le micronecton se situe au niveau intermédiaire de la chaîne alimentaire. En effet, le phytoplancton est consommé par le zooplancton lui-même consommé par le micronecton. Cette espèce joue un rôle central dans le fonctionnement de la chaîne alimentaire en assurant le transfert d’énergie du plancton vers les prédateurs supérieurs.

Le terme micronecton trouve son origine dans un nom composé. Le terme « micro- » fait référence à la taille de l’espèce marine étudiée et « -necton » au fait qu’elle est capable de nager, contrairement au plancton qui dérive au gré des courants marins.

La migration verticale : cette spécificité du micronecton

L’originalité du micronecton, organisme vivant capable de nager indépendamment du courant, réside dans sa capacité à migrer, migrations verticales qui jouent un rôle fondamental dans la pompe à carbone biologique au sein de son cycle et de sa séquestration.

Comment se déroulent les migrations verticales quotidiennes ?

  • Le jour, les micronectons descendent profondément dans les couches inférieures de l’océan. Cette migration verticale diurne est un processus principalement influencé par la lumière, la température, la nourriture et les prédateurs.
  • La nuit, les micronectons remontent à la surface de l’océan et se nourrissent de zooplanctons. A l’aube, le micronecton migre à nouveau en profondeur dans les couches inférieures de l’océan.

Diagramme montrant la migration verticale quotidienne des micronectons.
e.g., Credit: Pavanee Annasawmy; Annasawmy et al., 2019

Il est important de souligner que cette migration quotidienne du micronecton est la plus grande migration existant sur la planète Terre en termes de biomasse.

Ce processus a une triple importante : à la fois pour la survie et la reproduction des organismes planctoniques, pour le fonctionnement des écosystèmes marins et pour la régulation du climat.

La pompe biologique du carbone : le rôle du micronecton

Le micronecton stocke le carbone en profondeur dans les océans et contribue à la pompe biologique du carbone. La pompe biologique du carbone est une série de processus biologiques conduisant à transporter le carbone de la zone de surface vers les fonds marins. Cette migration quotidienne des micronectons contribue à transférer le CO2 atmosphérique anthropique, en injectant le carbone, dans la couche profonde de l’océan.

Chaque jour, au crépuscule, le micronecton remonte à la surface et se nourrit de zooplancton. Lorsqu’ils plongent à l’aube, les micronectons traversent la thermocline : la zone de transition entre les couches superficielles chaudes et oxygénées de l’océan, et les couches salées de l’océan. En plongeant dans les couches océaniques profondes (sous la thermocline), le micronecton transporte du CO2 contenu dans le zooplancton ingéré. Par ailleurs, la matière fécale des micronectons libérées dans les couches profondes de l’océan stocke le CO2. Enfin, à la mort de ces organismes, leurs carapaces plongent au fond des océans et contribuent encore une fois au stockage du carbone de manière durable.

Un zooplancton qui constitue la nourriture recherchée par les micronectons pendant la nuit à la surface des océans.

Quelles menaces pour le micronecton ?

La séquestration du carbone dans l’océan diminue en raison de l’acidification, du chalutage et de l’augmentation des températures. Le micronecton est menacé alors même que les migrations verticales qu’il génère sont responsables de l’atténuation du dérèglement climatique.

Par ailleurs, le micronecton est mangé par divers prédateurs tels que le thon et les oiseaux de mer pour lesquels il constitue une nourriture essentielle à l’équilibre de la chaîne trophique.

Dans l’Antarctique, le krill, petit crustacé de la famille des zooplanctons, voit son existence menacée par le dérèglement climatique et subit les conséquences de la fonte des glaces. Ses larves dépendent de la présence de la banquise qui est un abri pour le phytoplancton, nourriture essentielle de l’espèce. Or, le dérèglement climatique et la fonte des glaces en Antarctique affaiblissent les quantités de nourriture disponibles et donc les populations de krill.

Les micronectons, otaries, albatros et baleines, qui se nourrissent du krill, sont ainsi menacés par la diminution des populations de krill ayant un impact direct sur toute la chaîne alimentaire.

Enfin, le phytoplancton, premier maillon de la chaîne alimentaire qui absorbe le dioxyde de carbone pour créer de l’oxygène essentiel à la vie humaine sur Terre est lui aussi menacé. L’augmentation de la température et le phénomène d’acidification des océans entravent la calcification des squelettes de ces organismes marins.

La disparition des populations de micronecton pourrait avoir d’importantes conséquences sociales et économiques à l’échelle mondiale sur les zones de pêches ou le tourisme mondial par exemple.

Célestine Schmid
Chargée d’étude biodiversité

Pour aller plus loin :

Pour en savoir plus :

– Suivre notre Atelier MISSION Biodiversité : https://lnkd.in/eJb2zJ35
– Suivre notre MOOC Biodiversité : https://lnkd.in/eTXq7iUE
– Participer à notre formation Action Biodiversité : https://lnkd.in/e93iX_WZ